Fin 2019, le cabinet de conseil Proxinvest a révélé que les dirigeants des entreprises du CAC 40 avaient perçu une rémunération moyenne de 5,77 millions d’euros en 2018. Cette rémunération a continué d’augmenter pour atteindre une moyenne de 7,9 millions d’euros en 2022, soit une augmentation de presque 40% en seulement 4 ans alors que le salaire médian a lui augmenté de 3% entre 2020 et 2022 (soit 38537 euros brut annuel en 2020 à 39800 euros brut annuel en 2023).
Bien que l’entièreté de patronat ne se rémunère pas ainsi, les rémunérations les plus hautes doivent nous interpeler. En effet, aucune forme de travail ne mérite de telles rétributions financières. Et c’est pour cela que les jeunes socialistes doivent se poser des questions sur l’écart entre les revenus, de ce qui est acceptable dans notre société et ce qui ne l’est pas, tout en proposant des solutions !
Une question d’équité et justice
De telles rémunérations suscitent des interrogations sur la place que nous donnons à l’équité et à la justice dans notre société. Comment justifier qu’un dirigeant puisse percevoir des sommes astronomiques alors que des travailleurs luttent pour subvenir à leurs besoins essentiels ? Une réflexion s’impose quant à ce qui est acceptable et éthique en termes de rémunération. Sans cette dernière, nous continuerons à vivre dans un système où les 1 % les plus riches nous font croire, à grand renfort de mythes sur une certaine méritocratie, qu’ils méritent cet argent et que tout le monde peut en accumuler autant grâce au travail.
Une question de stabilité sociale
Les écarts de rémunération excessifs ont des conséquences néfastes sur la stabilité sociale de manière générale. Lorsque certains dirigeants reçoivent des sommes considérables tandis que les salaires stagnent, cela engendre des frustrations et des tensions au sein de la population. La cohésion sociale en est impactée, créant des clivages et des ressentiments. Il est essentiel de promouvoir une distribution plus équitable des revenus afin de préserver la stabilité sociale et de renforcer le tissu social de notre société.
Une question de lutte contre l’avidité excessive
La lutte contre l’avidité excessive est un enjeu crucial dans notre société. Les rémunérations exorbitantes des dirigeants alimentent une culture de l’enrichissement personnel démesuré, en déconnexion avec les réalités économiques et sociales. En s’interrogeant sur la justification de ces rémunérations, nous devons promouvoir des valeurs d’éthique et de responsabilité. En limitant les écarts de revenus et en mettant un frein à l’avidité excessive, nous devons encourgager des pratiques plus équilibrées et plus respectueuses des valeurs de solidarité et de justice sociale.
Des inégalités qui persistent entre les femmes et les hommes
Les inégalités économiques persistent entre les femmes et les hommes au sein des grandes entreprises françaises. Les femmes gagnent en moyenne 24% de moins que les hommes, avec des écarts salariaux de 16% à temps de travail égal et de 4% à poste comparable. Cette situation est expliquée par une double ségrégation professionnelle, où les femmes sont concentrées dans des secteurs moins rémunérés et sous-représentées dans les emplois les mieux payés.
Ainsi la gouvernance des grandes entreprises reste fortement masculine, avec moins de 11% de femmes occupant des postes de direction. Les femmes dirigeantes sont également moins rémunérées que leurs homologues masculins avec en moyenne 36% de rémunération en moins que leurs homologues masculins. Les hommes gagnent en moyenne 4,9 millions d’euros par an, contre 3,1 millions d’euros pour les femmes. A titre d’exemple, Carlos Tavares, directeur exécutif de Stellantis, gagne à lui seul plus que toutes les femmes dirigeantes des grandes entreprises réunies (66 millions d’euros quand même).
Ces questions ne sont pas nouvelles et font l’object de débats depuis bien des années dans de nombreux pays. Les jeunes socialistes français doivent donc prendre pleinement parti dans la lutte contre ces hauts salaires !
En 2013, les jeunes socialistes suisses avaient lancé le débat dans le pays helvétique en proposant une votation limitant l’écart entre les salaires à 12x le salaire minimun. Si à l’époque, les suisses étaient 35% à être favorable à cette mesure, cette campagne à grande échelle avait été un franc succès pour informer sur ce sujet tabou/caché avec un texte qui avait été signé plus de 100 000 fois et avaient même reçu l’aval des entrepreuneurs progressistes.
En 2020, c’est le député socialiste Dominique Potier qui, avec ses collègues du groupe à l’Assemblée Nationale avait proposé au parlement de limiter les écarts de revenu. Ils avaient également publié une tribune intitulée « Il est temps de poser une limite décente aux écarts de revenus » dans le journal Le monde.
Proposition de loi n°3094 pour une limite décente des écarts de revenu
Présentée par Dominique POTIER, Boris Vallaud, Valérie Rabault, Marie‑Noëlle Battistel, et les membres du groupe Socialistes et apparentés, députés en juin 2020.
5 pistes pour réduire l’écart entre les salaires !
- Établir une limite absolue de rémunération : Afin qu'aucun salaire ne puisse dépasser un certain multiple du salaire minimum, quel que soit le poste occupé nous devons établir une limite maximale de rémunération. Ainsi, aucun travail ne serait valorisé financièrement au-delà d'une échelle de rémunération équitable et morale.
- Instaurer une redistribution équitable des bénéfices : Mettre en place une politique de redistribution des bénéfices de l'entreprise, où une partie significative des profits serait allouée à l'augmentation des bas salaires, plutôt que d'être concentrée uniquement dans les rémunérations des hauts dirigeants. Cela permettrait de réduire les écarts de salaires et d'assurer une meilleure répartition des richesses.
- Rendre obligatoire la transparence totale des rémunérations : Exiger une transparence totale en ce qui concerne les salaires au sein de l'entreprise, en rendant publiques les rémunérations de tous les employés, y compris celles des dirigeants. Cette mesure permettrait d'instaurer un climat de confiance et de responsabilité, tout en permettant aux employés de mieux évaluer l'équité salariale et de demander des ajustements en cas d'inégalités injustifiées.
- Taxer progressivement les hauts salaires : Mettre en place un système de taxation progressive des hauts salaires, où les rémunérations au-delà d'un certain seuil seraient soumises à une imposition plus élevée. Cette mesure inciterait les entreprises à réduire les écarts de salaires et à réinvestir davantage dans la rémunération des employés à revenu plus modeste.
- Renforcer la représentation salariale dans les conseils d'administration : Favoriser une meilleure compréhension et une prise de décision équilibrée en matière de rémunération, avec une meilleure intégration des représentants des salariés dans les conseils d'administration des entreprises.
Je veux comprendre les inégalités de salaires ?
Observatoire des inégalités : "Où vous situez-vous sur l'échelle des salaires ?" : ici
"Comparez votre salaire à celui d’un PDG d’une grande entreprise française !" : ici
Rapport : "Inégalités salariales : aux grandes entreprises les gros écarts" : ici